15 janvier 2010
5
15
/01
/janvier
/2010
22:20
Celui qui écrit ces lignes mesure autant que faire se peut les mots qu'il trace car il est conscient que ces mots sont comme une traînée de poudre qui peut exploser à tout moment au contact du feu de l'interprétation.
Celui qui écrit ces lignes est un enseignant qui est en exercice de fonction depuis quatorze ans. Il ne prétend en aucun cas être un bon enseignant. Il se considère comme un enseignant ordinaire. Mais ce n'est pas de l'enseignement qu'il désire vous parler mais de la conscience professionnelle. Une conscience qui dépasse largement le territoire de l'enseignement pour embrasser tous les domaines et s'y enraciner...si toutefois cette conscience existe.
Alors, cette personne a fait un constat: ce n'est pas de compétences, ni d'expériences ni de profils qu'un métier manque mais tout simplement de conscience professionnelle.
Ainsi, il a remarqué que l'on exerce un métier donné par ...routine. Le coeur n'y est pas. La conscience encore moins. L'on se plaint de la situation financière-- et il y a de quoi-- mais l'on se pose pas cette question? Jusqu'au irais- je pour faire mon métier comme il se doit?
Le problème dans l'enseignement, et dans la santé aussi, est que l'on est en face d'êtres humains: élèves ou patients et non pas de paperasse. Comment voulez- vous donc qu'un élève aime une matière donnée si son professeur n'aime pas cette matière, une matière qu'il est censé enseigner? Comment voulez- vous qu'un apprenant soit sérieux et appliqué alors que son professeur lui donne, au fil des jours, des "contre- exemples" sur ce chapitre? Comment voulez- vous, pour simplifier, qu'un passager fasse confiance au chauffeur du train alors que ce dernier ne sait même pas où il va, de combien de carburant il dispose et depuis quand remonte la dernière visite mécanique de sa machine. Pire: il ne dispose ni de carte, ni de liaison radio, ni de valise à outils, ni même d'une montre?
Comment voulez- vous que l'on laisse un médecin exercer alors qu'il agresse verbalement ses patients, les tripote comme l'on ferait du bétail et les rend plus malades qu'il le sont déjà?
Ce même enseignant et ce même médecin souffrent le martyr sans se plaindre dans le secteur privé: heures supplémentaires dans des écoles agréées ou dans des garages, cliniques modernes ou mansardes dignes d'opérations clandestines d'avortement. Ce même enseignant et ce même médecin changent de peau dès qu'il s'agit de bénéfices supplémentaires pour compenser la misère de leur salaire gouvernemental.
Ils oublient que c'est grâce à leur diplômes d'Etat qu'ils sont admis dans le privé. Ils oublient que leur rémunération officielle est stable et durable. Ils oublient qu'ils désiraient tant être admis dans la fonction publique mais ...ils draguent les cours supplémentaires et les cliniques privées dès qu'ils sont titularisés. Pourquoi n'ont -ils pas le courage de claquer la porte de l'Etat et de s'étendre de tout leur long et de tout leur large sur le hamac confortable du secteur privé?
Quand on les voit travailler sans relâche dans le privé, on pense qu'ils sont sous l'effet d'une drogue stimulante. On ne les reconnaît plus. Et quand on les voit travailler en deuxième vitesse dans le secteur public on les prends pour des gens qui n'ont pas goûté au pain et à l'eau pendant des jours: tellement, ils font l'économie de leur énergie. On les prend pour des habitants d'une ville en état de siège.
Pourtant, ces fonctionnaires ne sont pas schyzophrènes. Ils font preuve de dynamisme et de conscience "commeriale" dans le privé car ils ont conscience qu'ils sont facilement "remplaçables" alors qu'au secteur public, ils pensent qu'ils sont... éternels.
Quant au mot "remords" ou "travail raté" ou "j'aurais pu faire mieux" ou "j'ai foiré" ou "autocritique"...ils ne figurent pas , hélas, dans leurs dictionnaires.
Et si cet élève était leur fils...Et si cette patiente était leur fille...Eh bien, ils n'envisagent pas ce scénario...Le seul scénario qui les préoccupe est: et s'ils amassaient le maximum d'argent. Or, commerce et conscience n'étaient jamais de bons copains.
Evidemment, on ne peut pas mettre tout le monde dans le même panier. Seulement, la conscience professionnelle est comme un virus: on l'a ou on ne l'a pas. Amitiés!
Published by Littérairement correct
-
dans
Réflexion
9 janvier 2010
6
09
/01
/janvier
/2010
00:26
You know that I couldn't
be a good lover even if I'd tried.
Cause You know that I wasn't
the man whom you looked for: I lied.
You know that I didn't
trick you but you said
that you live with a broken heart cause I wasn't
able to assemble your "heart's pieces" as they said.
But you know that I wasn't
the man who broke your heart but you lied
cause I know the man who didn't
cherish you when he flied
to an other country cause he couldn't
love a wicked woman: you hit him and you cried!
Published by Littérairement correct
-
dans
poèmes
9 janvier 2010
6
09
/01
/janvier
/2010
00:11
Et si on oubliait
Et si on s'aimait
comme on le faisait.
Et si on se réconciliait.
Et si on empruntait
le même chemin qu'on empruntait.
Et si on décidait
de vivre ensemble comme on faisait.
Et si on s'asseyait
à cette table que tu aimais
pour un dîner aux chandelles que tu prisais,
pour un face-face silencieux que tu aimais,
pour un dialogue muet entre deux baisers volés.
Et si on décidait
de repartir à zéro sans râler,
de nous mettre d'accord, pour une fois, s'il te plaît:
nous installerions notre amour sur une vallée
où nous transformerions notre baraque en un palais!
Published by Littérairement correct
-
dans
poèmes
8 janvier 2010
5
08
/01
/janvier
/2010
23:39
Si tu punis le mal par le mal
comment veux-tu que je t'aime, dis?
Si tu punis le mal par le mal,
pourquoi joues-tu la victime, dis?
Si tu punis le mal par le mal
parle-moi donc de ta clémence, dis?
Si tu punis le mal par le mal
où est ta patience proverbiale, dis?
Si tu punis le mal par le mal
comment veux-tu que je crois en toi, dis?
Si tu punis le mal par le mal
ne risquerai-je pas de perdre ma foi en toi, dis?
Si tu punis le mal par le mal
ne me parle plus du pardon, dis?
Car si tu punis le mal par le mal
n'ai-je pas le droit de faire de même, dis?
Published by Littérairement correct
-
dans
poèmes
1 janvier 2010
5
01
/01
/janvier
/2010
00:28
If you love me so really
tell me then what I have to do
to stop your strong and hypnotic love
which is so convincing and so attractive
that he makes me an officier of love for the first time
when I used to be just an unknowing merceneray.
If you love me so strongly
tell me then where I must to be
to escape from your wonderful malediction
which makes me a fervent repentant on your list
when I used to be an officiel nihilist.
If you love me so strangely
tell me then when I must to move:
I'am expecting your orders unless you prefer to say:"
"I'am your subordinate, darling. Let's forget yesterday".
Then we will face our common enemy:
your jealousy, madam, which shatters all the castles I built for years, willingly.
So, darling, let's build, together, a last castle near the charming bay. Merry Crhistams, darling!
Mohamed AZZAMORI.
Published by Littérairement correct
-
dans
poèmes
31 décembre 2009
4
31
/12
/décembre
/2009
19:26
Quand on fait une fausse couche
ou qu'on souffre de maux de coeur
ou qu'on pleure sous la douche
c'est la faute au professeur
Quand on rate le nouvel an
ou qu'on rate sa vie entière
quand on renverse la cafetière
c'est la faute à l'enseignant
Quand on attrape un sale virus
que l'on se saoûle; que l'on se drogue
quand on est un simple minus
c'est la faute au pédagogue
Quand on est fait fainéant
ou trouble- fête ou malheureux
quand on envie les gens heureux
c'est la faute à l'enseignant
Quand on manque souvent de cran
ou que l'on est vaincu par l'Inconnu
quand notre bilan est maigre et nu
c'est la faute à l'encadrant
Quand on conduit mal tout le temps
quand on est bon copain avec la peur
quand on ne peut pas freiner à temps
c'est la faute à l'instructeur.
Published by Littérairement correct
-
dans
poèmes
30 décembre 2009
3
30
/12
/décembre
/2009
23:37
Il était une fois, dans un restaurant populaire, un cuisinier qui faisait des plats extraordinaires: succulents, en un mot. Ses clients amenaient d'autres clients à son modeste restaurant et ceux-ci y amenaient d'autres et ainsi de suite. Très vite, on n'y trouvait plus de table libre ni même de coin libre. Les gens prenaient leurs repas en plein air, devant le restaurant, en parlant de la pluie et du mauvais temps...C'était des moments de joie extrême...
Seulement, il y avait quelque chose qui intriguait les consommateurs autant que le cuisinier lui- même: ses clients restaient toujours sur leur faim. Ils commandaient des plats et encore et encore. Mais ils avaient toujours faim, une faim bizarre que vous ressentez souvent après un repas copieux et arrosé, une faim qui vous fait sentir léger comme un oiseau, une faim bénéfique, une faim qui stimule votre moral et qui vous pousse à méditer sur les quesions existentielles, un faim qui ne fait pas de mal. En somme, une faim nourrissante, assouvissante, rassasiante. C'est pourquoi, les clients s'en allaient, satisfaits, pour vaquer à leurs besognes et pour...revenir le plus tôt possible à ce restaurant où on servait des mets délicieux mais magiques.
La satisfaction était donc générale. Mais le cuisinier n'était pas pour autant satisafait: les gens payaient leur argent pour être servis--c'est ce qu'il faisait à merveille--mais encore pour bien manger--c'est ce qu'ils faisaient à la perfection-- mais surtout pour ASSOUVIR leur faim. Cette faim n'était jamais assouvie, cependant. Certes, les gens quittaient le restaurant, rieurs et joyeux, mais un regard, un rictus, une esquisse de grimace...trahissaient un ...côté insatisfait chez ces gens: ils auraient aimé avoir encore plus de mets, plus de plats. Mais pourquoi donc sa cuisine N'assouvissait PAS la faim de ses chers clients? Il suffisait juste de jeter un regard à leurs plats vides: on aurait dit qu'ils les avaient lavés, rincés et essuyés...
Le cuisinier ne dormait plus. Il voulait découvrir le secret de cette faim qui grandissait au fur et à mesure qu'on la comblait. Les gens de leur côté parlaient: ceratins disaient que cette faim était prémiditée par le cuisinier: il mettait des produits étranges dans les plats qu'il préparait, d'autres affirmaient en hôchant la tête que c'était la "recette" du cuisinier qui y était pour quelque chose, et enfin, d'autres juraient leurs grands dieux que le cuisinier disposait d'une marmite magique qui faisait tout le travail...Les bruits circulaient dans la ville, les suppositions allaient bon train. Le préfet décida de vérifier par lui- même et de résoudre l'énigme du cuisinier.
Un jour, le préfet se déguisa en homme de peuple et débarqua dans ce restaurant de peuple. Il commanda un plat populaire et côtoya le peuple. Il voulut commander un autre plat mais il n'a pas pu: il était déjà rassasié. Mais il ne comprenait pas l'empressement du peuple: des cris qui commandaient des plats , des gens déjà servis qui se bousculaient pour être resservis, des gens qui demandaient, la bouche pleine, d'être resservis alors qu'ils venaient juste d'entamer leur plat...Bref, le préfet voyait des Gargantua partout autour de lui...Heureusement pour lui que ces gens ne mangeaient pas de la chair humaine, surtout celle des représentants de l'Etat. Mais pourquoi Diable, lui, qui avait un estomac pourtant comme celui des autres n'a ressenti plus de faim juste après avoir fini son premier plat? Il s'estimait même repu!
Le préfet découvrit le pot -aux-roses le soir- même. Il n'avait pas bsoin de passer des nuits à cogiter et d'ailleurs c'était simple: ce n'était ni le cuisinier ni sa marmite qui "assuraient" ce succès culinaire. Les gens du peuple le faisaient. Ils avaient un appétit insatiable car rien ne les préoccupaient...absolument rien. Tout se passait donc dans les esprits des gens et non dans leurs estomacs...Et voilà, l'énigme fut résolue... Enfin, d' après M. le préfet.
Published by Littérairement correct
-
dans
Nouvelles
30 décembre 2009
3
30
/12
/décembre
/2009
00:22
Il était une fois, dans un village lointain et isolé, un enseignant plein de ressources et de bonne volonté. Il était confronté à une classe difficile, non à cause de l'indiscipline, mais à cause du manque de toute réaction chez les apprenants: les élèves étaient là, présents, calmes et sages. Mais l'enseignant ne lisait dans leurs yeux aucune intelligence. Les élèves le regardaient comme l'on regarde un prêtre parlant latin: on le respecte mais on ne comprend rien. Les élèves de ce jeune enseignant étaient de cette race: ils le regardaient mais il pouvait quitter la classe s'il le désirait sans qu'ils s'en renderaient compte. Bref, leurs regards étaient dénués de toute expression humaine...encore moins animale.
L'enseignant se plaignit un jour au proviseur qui se contenta de le regarder. Le délégué fit de même. L'enseignant commença à avoir des doutes: et si c'était lui, le malade? Et si c'était lui qui ne comprenait rien au langage du regard....Il s'acheta donc un miroir.
Pendant toute une nuit, L'enseignant se regarda dans le miroir. Il se rendit compte que son regard était plus...scintillant, plus vivace, plus vivant que le regard de tous les gens du village, mais puisqu'il était le seul enseignant au village, il prit son mal en patience et décida de "cultiver" chaque soir son regard à lui, devant le miroir, pour que ce scintillement qui se dégageait de ses yeux durât pendant les années qu'il devait passer dans ce village. Et, chaque soir, l'enseignant fit, chez lui, de la gymnastique visuelle, et prit soin de son regard comme l'on prend soin de son corps dans une salle de sport parisienne.
Au jour, il se contentait de faire ses cours à des élèves qui ...se contentaient de le regarder, il parlait à des commerçants qui ne faisaient que...le regarder et il regardait à son tour tous ces gens, mais d'un oeil vif, intéressé, curieux...un oeil d'anthropologue.
Il décida donc de mener des recherches au sujet de ce regard trasparent et mort-- un regard qui ressemblait à un lac si limpide qu'on a l'impression que l'eau n'existe pas-- et pour ce faire, notre enseignant passa des nuits blanches à mettre en ordre ses notes, à en tirer les conclusions qui s'en imposaient et surtout à mener sa recherche selon une méthode expérimentale rigoureuse...
Des annèes passèrent. Un beau jour de Septembre, un nouvel enseignant, jeune et frais, débarqua au village pour relever notre enseignant qui y avait passé une trentaine d'années. La jeune recrue vint, par courtoisie, rendre visite à notre enseignant pour "officialiser la passation des pouvoirs" et en même temps pour s'enquérir auprès de son collègue des us et des coutumes de ce village. Il vint donc le trouver dans sa classe.
La nouvelle recrue eut un cri de stupeur: son collègue, quinquagénaire, était toujours jeune et frais comme à son premier jour d'enrée en service--comme si le Temps ne passait pas par ce village-- mais surtout l'enseignant quinquagénaire regardait la nouvelle recrue d'un regard...vide de toute expression d'intelligence!
Published by Littérairement correct
-
dans
Nouvelles
27 décembre 2009
7
27
/12
/décembre
/2009
01:10
Il avait mis ses plus beaux vêtements: son uniforme militaire qu'il chérissait. Il n'avait pas oublié d'accrocher sur sa poitrine ses médailles et ses décorations. Son corps avait l'air d'un sapin de Noel décoré par de multiples guirlandes et rubans. C'était d'ailleurs le réveillon.Il le célébrait seul, dans son appartement de la 6 ème avenue.Il avait pensé à tout:champagne et musique classique...la bierre et la musique populaire, il les laissait aux sous-officiers.
Il trinquait avec lui- même, en silence. La musique classique était le seul signe d'un appartement habité. celui-ci avait l'air d'un temple, tellement notre homme se comportait avec discrétion et précaution. On aurait dit qu'il n'était pas chez lui...Mais il était comme ça: d'une éducation et d'un esprit raffinés.
C'est pourquoi les faucons de l'Etat-Major le trouvait trop...fragile pour l'armée. Non pas parce qu'il aurait commis une bavure quelconque-- au contraire, son parcours était héroïque-- mais car il sentait, selon ses généraux... "l'intellectuel". Or, un militaire de formation et de vocation ne doit jamais penser mais exécuter...et lui...il pensait...et justement...il pensait trop.
L'armée était sa famille, son foyer, sa maîtresse et ...sa vie. Il le savait mais l'armée ne le savait pas. C'est pourquoi, il fut déssaisi, deux jours auparavant d'un commandement qu'on venait de lui confier.Motif de la décision de l'Etat-Major quant à cette...punition? Le capitaine prenait trop d'initiaives de par lui-même. Certes, il ne désobéissait pas aux ordres mais il ne s'empressait pas non plus de les exécuter, car, à chaque fois, il osait émettre des remarques...ce qui est malsain dans l'armée.
Ses hommes l'aimaient même s'il était dur avec eux (mais jamais injuste). Il était dur avec eux, ils les punissait même, le cas échéant, mais il les défendait comme une louve ferait pour ses petits, face à l'Etat-Major: à chaque fois, il préférait endosser la responsabilité d'une bavure d'un subordonné pour lui éviter la cour martiale...et à chaque fois, il passait ainsi à côté d'un avancement...Tant pis, on ne peut pas avoir l'avancement et l'estime de ses hommes.
Il était à son énième verre alors que sa vie se déroulait comme un film devant ses yeux. Il était preque allongé sur son fauteil, la cravate déssérée. Il pensait: il s'adonnait donc à son péché capital.
Quand la musique se tut, il se mit debout et s dirigea vers sa chambre à coucher. Il ouvrit grandes ouvertes les persiennes et respira longuement l'air froid de cette soirée de Décembre comme s'il allait faire une plongée sous- marine. Les cris de la foule ivre de joie et de mauvais alcool montaient jusqu'à lui. Il demeura dans cette posture, à la fenêtr ouverte, emplissant ses poumons d'air froid et de mélancolie et fixant au loin quelque chose dans le vide.
Puis, il avança calmement vers son secrétaire, ouvrit le premier tiroir et en prit avec religion un pistolet. Il le tourna lentement vers sa tempe droite et tira...
En bas, la foule continuait ses chants et ses danses...La foule, au moins, a cette qualité: elle ne pense pas. C'est pourquoi le suicide ne risque jamais de faire des ravages au milieu de ses "gradés".
Published by Littérairement correct
-
dans
Nouvelles
25 décembre 2009
5
25
/12
/décembre
/2009
23:49
L'homme avait de la peine à parler: il était tellement ivre. Il ne sentait pourtant pas l'alcool, enfin pas trop, vu la quantité qu'il avait bue! Le champagne était son vin favori. Il lui arrivait- même de prendre des douches, littéralement parlant, avec du champagne: il disait qu'il était mousseux et qu'il aimait le sentir sur sa peau comme une caresse féminine...Bref, il était ivre...c'est une litote, car il était l'ivresse- même et il parlait de manière très décousue...
Son chauffeur se contentait de lui lancer, de temps à autre, des regards neutres, dans le rétroviseur. Pourtant, il avait envie de le jeter par-dessus bord, dans un fossé, sur cette nationale peu fréquentée ce froid dimanche, tellement il le détestait. Mais si cet homme mourait, c'était son gagne-pain à lui qui serait mis en cause. Alors, le chauffeur prit son mal en patience et tentait de se contrôler en haussant progressivement le son de la radio qui diffusait un bulletin- météo plus noire que la limousine qu'il conduisait...
Car, au moins, le rabâchage gouvernemantal valait mieux que le délire d'alcoolique de son patron. Celui-ci continuait de divaguer: il parla de son enfance, de ses maîtresses et puis de ses beaux châteaux disséminés dans les quatre coins du pays...Il ajouta, en soupirant, alors que la radio s'était tue --et du coup ses paroles ont résonné dans la voiture telles un verdict dans un tribunal--:"Voyez- vous...finalement...mon cher Georges...je n'ai pas de domicile fixe...je suis un SDF.... en quelque sorte"...
Georges freina net et sec. Il se tourna vers son employeur et le mittrailla de regard:"un SDF, dites- vous?". Le milliardaire se contenta d'esquisser un sourire bête, signe qu'il n'a pas compris la question de son chauffeur ni son agressivité soudaine, mais Georges était cette fois- ci hors de lui pour de bon , il descendit de la voiture et alla ouvrir avec empressement la portière de son patron. Il le tira de son confort sans que l'homme, trop ivre pour réagir, ne pût opposer une quelconque résistance ni dégainer son colt qu'il ne quittait jamais, puis Georges le jeta au bord de la route, dans la neige blanche et pure que le corps du milliardaire ramassé en boule vint la salir comme la fiente d'un corbeau...
Georges revint à son volant, claqua la portière et partit de vive allure tout en contemplant dans son rétroviseur son patron se démener et gesticuler comme une marionnette en tentant de se dégager de cette neige dont la froideur acérée le pénétrait jusqu'aux os....Georges lui jeta un dernier coup d'oeil dans le rétroviseur en grommelant:"SDF, mon c..."
Published by Littérairement correct
-
dans
Nouvelles